Chapitre 7: Ordre Gleysolique

Les profils de quelques sous-groupes de sols de l'ordre gleysolique sont représentés schématiquement représentés à la figure 32. Les sous-groupes de sols individuels peuvent inclure des sols dont les séquences d'horizons sont différentes de celles illustrées. Dans les descriptions de chaque sous-groupe de sols présentées plus loin dans ce chapitre, on donne une séquence d'horizons typique pour chaque sous-groupe de sols. Les horizons diagnostiques sont indiqués en souligné et certains autres horizons fréquemment rencontrés sont énumérés.

Figure 32 Représentation schématique des horizons de quelques sous-groupes de l'ordre gleysolique

La description de cette image suit.

Les sols de l'ordre gleysoliques se définissent d'après les couleurs et la marmorisation qui sont considérées comme indicatrices de l'influence de conditions de réduction périodique ou permanente au cours de la pédogenèse du sol. Les critères qui suivent s'appliquent à tous les horizons, sauf les horizons Ah, Ap et Ae. Toutefois, si l'horizon Ae est plus épais que 20 cm et si sa limite inférieure est située à plus de 60 cm sous la surface du sol minéral, les critères s'appliquent au Ae. En outre, si l'épaisseur de l'horizon Ah ou Ap dépasse 50 cm, le critère de couleur s'applique à l'horizon minéral situé immédiatement en-dessous. Mis à part ces exceptions, les critères se lisent comme suit : les sols gleysoliques ont un horizon ou un sous-horizon d'au moins 10 cm d'épaisseur (à moins de 50 premiers centimètres de la surface du sol minéral) avec des couleurs à l'état humide suivantes :

  1. Pour tous les sols, sauf ceux avec des matériaux rouges (teinte de 5YR ou plus rouge, dont la couleur pâlit lentement lors du traitement au dithionite du sol).
    1. Des saturations dominantes de couleur de 1 ou moins dans les teintes plus bleues que 10Y avec ou sans marbrures, ou
    2. Des saturations dominantes de couleur de 2 ou moins dans les teintes de 10YR et 7,5YR accompagnées de marbrures marquées de 1 mm ou plus de diamètre dans la coupe transversale, occupant au moins 2 % d'une couche exposée de 10 cm, non dérangée artificiellement, ou
    3. Des saturations dominantes de couleur de 3 ou moins dans des teintes plus jaunes que 10YR, accompagnées de marbrures marquées 1 mm ou plus de diamètre dans la coupe transversale et occupant au moins 2 % d'une couche exposée de 10 cm, non dérangée artificiellement.
  2. Pour les matériaux de sols rouges (une teinte de 5YR ou plus rouge dont la couleur pâlit lentement lors du traitement au dithionite).
    1. Des marbrures distinctes ou marquées d'au moins 1 mm de diamètre occupant au moins 2 % d'une couche de 10 cm exposée, non dérangée artificiellement.

Les sols de l'ordre gleysolique ont des propriétés qui indiquent l'influence de périodes prolongées de saturation d'eau périodique ou permanente sous des conditions réductrices pendant la pédogenèse. La saturation d'eau peut être due à une nappe phréatique élevée ou à l'accumulation temporaire d'eau au-dessus d'une couche relativement imperméable ou les deux. À l'opposé, les sols saturés périodiquement d'eau aérée ou saturés pendant de longues périodes de temps froid limitent l'activité biologique sans développer les propriétés associées aux conditions réductrices et ne sont pas classifiés comme gleysoliques.

Les sols gleysoliques sont associés à un certain nombre de régimes hydriques différents qui peuvent changer au cours de la pédogenèse. Couramment, ils ont des régimes d'humidité peraquiques ou aquiques, mais certains ont des régimes aqueux et d'autres sont aujourd'hui rarement, sinon jamais saturés d'eau. Les sols qui sont rarement saturés dans les conditions présentes ont présumément déjà subi des régimes d'humidité aquiques dans le passé, alors qu'ils étaient soumis à des conditions réductrices mais le drainage, le relèvement isostatique ou d'autres facteurs ont entraîné le changement des régimes hydriques dans ces sols.

Les sols gleysoliques se rencontrent en association avec d'autres sols dans le paysage, dans certains cas à titre de sols dominants et dans d'autres, à titre de composante mineure. Dans les régions caractérisées par un pédoclimat subhumide, les sols gleysoliques se rencontrent généralement dans des dépressions peu profondes et sur des terres basses horizontales saturées d'eau à tous les printemps. Dans les régions plus humides, ils peuvent s'observer également sur des pentes et sur des terrains ondulés. Habituellement, la végétation naturelle associée aux sols gleysoliques diffère de celle associée aux sols d'autres ordres de sols.

Voici quelques remarques sur la justification des critères de couleur. Les critères s'appuient sur la couleur parce cette dernière est l'indice le plus facilement observable et constitue un indicateur utile sur l'état d'oxydo-réduction d'un sol qui a prévalu au cours de sa genèse. Les potentiels redox mesurés à plusieurs profondeurs dans les pédons pendant la période durant laquelle le sol n'est pas gelé fournissent des données utiles sur les conditions habituelles de réduction. Des valeurs du potentiel électrique de 100 mV ou moins sont associées à des formes réduites de manganèse (Mn) et de fer (Fe). Cependant, certaines valeurs indiquent les conditions de réduction actuelles et non celles qui existaient au cours des longues périodes pendant lesquelles le sol s'est formé. De même, la surveillance des propriétés du régime d'humidité, comme la profondeur de la nappe phréatique, peut fournir de précieux renseignements sur l'état actuel du sol mais elle n'explique pas nécessairement le régime d'humidité qui existait au cours de sa pédogenèse.

Les critères de couleur utilisés pour les matériaux de sol rouge sont différents de ceux utilisés pour les matériaux des sols des autres couleurs car on a constaté que même l'existence de conditions de saturation prolongées et présumément réductrices n'a pas entraîné la formation de couleurs gris terne dans certains de ces matériaux. En règle générale, certains sols sont marmorisés dans les horizons situés près de la surface. Dans certains cas, des marbrures grises ont été observées dans une matrice rougeâtre et dans d'autres, des marbrures d'un brun intense ou d'un rouge jaunâtre dans une matrice à faible saturation de couleur. La couleur de la matrice est considérée comme la couleur dominante.

Il a fallu faire des exceptions dans l'application des critères aux sols possédant des horizons Ah, Ap ou Ae, car des saturations de couleur de 1 se rencontrent dans certains de ces horizons de sols oxydés. En outre, des marbrures marquées peuvent apparaître dans les horizons Ae recouvrant des horizons relativement imperméables de sols généralement oxydés. Mais dans le cas d'horizons Ae épais, la présence de marbrures marquées dans la partie supérieure de l'horizon est censée indiquer l'existence de conditions réductrices périodiques près de la surface. Ces exceptions n'ont pas été vérifiées et nécessiteront probablement un certain réajustement.

Les critères de couleur exigent une taille et une abondance minimales de marbrures dans un sous-horizon de 10 cm d'épaisseur ou plus, car il semble déraisonnable de fonder la classification au niveau de l'ordre sur la fréquence d'apparition de marbrures rares ou fines dans une couche mince. Il faut être prudent dans l'évaluation de l'abondance des marbrures : en effet, les marques de matériaux ocreux sur le profil peuvent entraîner des surestimations et le fait de ne pas rechercher de marbrures dans et sur les peds peut aboutir à des sous-estimations. L'utilisation d'un l'étalon pour les marbrures facilite l'estimation de leur abondance.

Différenciation entre les sols gleysoliques et ceux des sols d'autres ordres de sols

Voici les directives pour distinguer les sols gleysoliques des sols des autres ordres de sols avec lesquels on pourrait les confondre :

Brunisoliques. Les sous-groupes gleyifiés des sols brunisoliques se différencient des sols gleysoliques parce que leur gleyification est trop faiblement exprimée pour satisfaire aux exigences des sols gleysoliques.

Chernozémiques. Certains sols possèdent un horizon A chernozémique et affichent des couleurs ternes ou des marbrures révélatrices d'une gleyification dans la coupe témoin. Ceux qui satisfont aux exigences prescrites pour les sols gleysoliques sont classés dans l'ordre gleysolique. Ceux qui présentent les caractéristiques de gley à moins de 50 cm de la surface du sol minéral mais qui ne peuvent satisfaire au critère de l'ordre gleysolique ou qui ont des couleurs de faible saturation ou des marbrures, ou les deux, au-delà de 50 cm de profondeur, sont classés comme sous-groupes gleyifiés des grands groupes de sols appropriés de sols chernozémiques.

Cryosoliques. Certains sols cryosoliques ont des couleurs de matrice de faible saturation et des marbrures prononcées à moins de 50 cm de la surface, comme les sols gleysoliques. Toutefois, dans les sols gleysoliques, il n'y a pas de pergélisol à moins de 1 m de profondeur, ou à moins de 2 m si le sol est fortement cryoturbé.

Luvisoliques. Certains sols ont des horizons éluviaux, des horizons Bt et des couleurs révélatrices d'une gleyification à moins de 50 cm de la surface du sol minéral. Certains sont classés comme des gleysols luviques si les couleurs de gley, telles que définies pour l'ordre gleysolique, se rencontrent dans l'horizon Btg à moins de 50 cm de la surface du sol minéral. Si ces couleurs de gley se rencontrent seulement dans l'horizon Aeg (à l'exception des horizons Ae épais) ou seulement à une profondeur de plus de 50 cm, le sol est classé comme sous-groupe gleyifié du grand groupe approprié de l'ordre luvisolique.

Organiques. Les sols gleysoliques peuvent avoir des couches de surface organiques, mais elles sont trop minces pour satisfaire aux limites minimales prescrites pour les sols de cet ordre.

Podzoliques. Un horizon B podzolique a préséance sur les caractéristiques de gley. Ainsi, un sol ayant à la fois un horizon B podzolique et l'indication de gleyification qui satisfait les définitions pour les sols gleysoliques est classé comme un podzol.

Régosoliques. Les sols sans horizon différencié, mis à part les signes d'une gleyification tels que définis pour les sols gleysoliques, sont classés comme gleysoliques.

Solonetziques. Les sols qui possèdent un horizon Bn ou Bnt et qui présentent une gleyification telle que définie pour les sols gleysoliques sont classifiés dans les sous-groupes solonetziques des grands groupes de sols appropriés de l'ordre gleysolique.

Vertiques. Certains sols gleysoliques ont un horizon avec des faces de glissement mais les sols vertiques ont à la fois un horizon vertique et un horizon avec des faces de glissement.

Les sols gleysoliques se divisent en trois grands groupes de sols : gleysol luvique, gleysol humique et gleysol, qui se distinguent d'après le développement de l'horizon Ah et la présence ou l'absence d'un horizon Bt, comme le montre le tableau de l'ordre gleysolique.

Ordre gleysolique
  Gleysol luvique Gleysol humique Gleysol
Les horizons diagnostiques sont indiquées en souligné
Horizon A Habituellement un horizon Ahe ou Aeg Un horizon Ah d'au moins 10 cm d'épaisseur Aucun horizon Ah ou un horizon Ah d'une épaisseur de moins de 10 cm d'épaisseur
Horizon B Un horizon Btg Aucun horizon Bt Aucun horizon Bt


Grand groupe Sous-groupe

Nota : Les grands groupes et les sous-groupes sont énumérés dans l'ordre dans lequel ils sont classés. Par exemple, si un sol gleysolique possède un horizon Btg, c'est un gleysol luvique, qu'il ait ou non les horizons ou couches suivants : Ah, Bn, Bgf ou un fragipan. Le gleysol luvique est le premier grand groupe de sols inscrit. De même, au niveau du sous-groupe de sols, si un gleysol luvique possède un horizon B solonetzique, il est classé comme un gleysol luvique solonetzique, qu'il ait ou non les horizons suivants : un fragipan, Ah ou Bgf. En résumé, toute classe au niveau du grand groupe ou du sous-groupe de sols ne doit pas avoir les propriétés diagnostiques des classes énumérées au-dessus d'elle. Par exemple, un gleysol régosolique ne possède pas les éléments suivants : un horizon B tel que défini pour le gleysol orthique, un horizon Bgf ou un horizon B solonetzique.

Gleysol luvique Gleysol luvique vertique GLQ.VQ
Gleysol luvique solonetzique GLQ.SQ
Gleysol luvique fragique GLQ.FR
Gleysol luvique humique GLQ.HU
Gleysol luvique ferrique GLQ.FE
Gleysol luvique orthique GLQ.OR
Gleysol humique Gleysol humique vertique GHU.VQ
Gleysol humique solonetzique GHU.SQ
Gleysol humique ferrique GHU.FE
Gleysol humique orthique GHU.OR
Gleysol humique régosolique GHU.RQ
Gleysol Gleysol vertique G.VQ
Gleysol solonetzique G.SQ
Gleysol ferrique G.FE
Gleysol orthique G.OR
Gleysol régosolique G.RQ

Source : Le système Canadien de classification des Sols (3ième éditions)

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