Chapitre 2: Sol, pédon, coupe témoin et horizons du sol

Au Canada, la taxonomie du sol repose sur les propriétés du sol. Ce simple énoncé implique la nécessité de définir le sol, par opposition au non-sol et l'unité de sol à être classée. Ces définitions et celles, tout aussi fondamentales, des horizons du sol sont données dans ce chapitre.

Le sol et le non sol

Les ensembles de sol et de non-sol se présentent comme un continuum à la surface de la terre. Ils se fondent graduellement l'une dans l'autre, souvent le long de frontières imperceptibles, à travers la définition de limites arbitraires. Dans ce système, le sol est défini comme un matériau minéral ou organique non consolidé, d'au moins 10 cm d'épaisseur, qui se trouve naturellement à la surface de la terre, capable de supporter la croissance des plantes. D'après cette définition, les matériaux qu'on « trouve naturellement » incluent ceux dont la surface est dérangée par le travail de l'homme pour la culture et l'abattage des arbres, mais non les matériaux déplacés comme les remblais de gravier et les déblais de mine. Un matériau non consolidé comprend les matériaux compactés ou cimentées par des processus de formation du sol. Le sol s'étend depuis la surface de la terre à travers les horizons génétiques, s'il y en a, jusque dans le matériau sous-jacent, pour atteindre la profondeur de la coupe témoin. Il peut être couvert d'eau en surface jusqu'à une profondeur de 60 cm ou moins, soit à marée basse le long des littoraux, ou durant la période la plus sèche de l'année à l'intérieur des terres. Un sol recouvert à la surface d'un placage de matériau nouveau d'au moins 50 cm d'épaisseur est considéré comme un sol enterré. Le développement du sol implique des facteurs climatiques et des organismes, soumis aux conditions du relief, donc au régime de l'eau, agissant à travers le temps sur les matériaux géologiques et modifiant ainsi les propriétés du matériau parental.

Le non-sol est l'agrégation de matériaux de surface qui ne rencontrent pas la définition précédente du sol. Le non-sol comprend les matériaux du sol déplacés par des procédés non naturels, comme les remblais de terre, les matériaux minéraux non consolidés ou organiques de moins de 10 cm d'épaisseur sur le roc, les affleurements rocheux et les matériaux non consolidés recouverts par plus de 60 cm d'eau à l'année longue. De plus, le non-sol comprend aussi les matériaux organiques de moins de 40 cm sur l'eau.

Ces définitions reflètent le fait que les ensembles de sol et de non-sol forment un continuum de propriétés. Par exemple, l'épaisseur du matériau du sol sur le roc peut être de 1 mètre, au pied d'une pente, de 20 cm à la mi-pente et s'amincir graduellement jusqu'à un affleurement rocheux vers le sommet. L'affleurement rocheux est un non-sol, mais il n'est pas clair quelle épaisseur de matériau non consolidé devrait être considérée comme sol. Pour éviter l'ambiguïté et ainsi permettre l'uniformité dans la classification, une épaisseur minimum arbitraire de 10 cm est utilisée. De la même façon, dans les paysages naturels, les sols périodiquement submergées se fondent graduellement dans les plans d'eau.



Le pédon, l'unité de base du sol

Le pédon, tel que défini par les pédologues des États-Unis (Soil Survey Staff, 1975), sert d'unité de base du sol dans le système canadien de classification. Le pédon est la plus petite unité tridimensionnelle à la surface de la terre considérée comme sol. Ses dimensions latérales sont d'un mètre, lorsque la variation ordonnée des horizons génétiques peut être échantillonnée à l'intérieur de cette limite ou lorsque ces horizons sont peu nombreux et faiblement exprimés. Lorsque de tels horizons sont cycliques ou intermittents et qu'ils se répètent sur une distance latérale de deux à sept mètres, les dimensions latérales du pédon sont la demi-longueur du cycle (de 1 à 3,5 m). La dimension verticale du pédon s'étend jusqu'à la profondeur de la coupe témoin. Un groupe contigu de pédons semblables s'appelle un polypédon, désigné comme unité de classification dans le Soil Taxonomy (Soil Survey Staff, 1975).

Le concept de pédon s'applique à la classification de tous les sols, mais son application aux sols ayant des variations cycliques, comme les cryosols turbiques, est des plus évidente. Des exemples de pédon sont illustrés aux figures 1, 2 et 3. Dans la figure 1, le profil dans le matériau sous les cercles de pierres non triés diffère considérablement de celui entre ces cercles. Cependant, la variation est cyclique et apparaît régulièrement dans le paysage. Dans le cas des cercles de pierres, l'unité de base des sols polygonaux est délimitée par les dépressions qui forment le périmètre des cercles de pierres. Le diamètre du cercle de pierres est mesuré à partir du centre de la dépression d'un côté du cercle jusqu'au centre situé de l'autre côté. Si le diamètre ne dépasse pas deux mètres, le cycle complet constitue le pédon (figure 1). Toute la variabilité à l'intérieur d'un pédon est comprise dans le concept des classes taxonomiques depuis l'ordre jusqu'à la série de sols. Dans ce cas, la classification s'appuierait sur les propriétés du matériau entre les cercles de pierres parce qu'il est dominant en étendue. Si les cercles de pierres étaient plus éloignés les uns des autres, de sorte que les cycles complets seraient de deux à sept mètres de diamètre, le pédon comprendrait la moitié du cycle. Il s'étendrait du centre d'un cercle de pierres jusqu'à la mi-distance de la dépression entre les cercles de pierres du matériau. Si la dimension latérale du cercle de pierres excédait sept mètres, deux pédons seraient identifiés. C'est souvent le cas pour les sols avec des coins de glace, un pédon est associé avec la dépression de la cuvette du coin de glace et l'autre est associé à la partie centrale du polygone avec le coin de glace ou du cercle de pierres.

La description de cette image précède.

Figure 1 : Pédon d'un cryosol turbique orthique dans une zone de cercles de pierres non triées.

Dans la figure 2, on voit la variation cyclique comportant des langues de l'horizon Ahgj pénétrant l'horizon IICkgj (Voir la section : Horizons du sol et autres couches). Le cycle complet a des dimensions latérales d'environ un mètre ou moins et, en conséquence, le pédon comprend un cycle complet. Toute la variabilité dans l'épaisseur du Ahgj est comprise dans le concept de la série de sols.

La description de cette image précède.

Figure 2 : Pédon d'un chernozem noir régosolique gleyifié pénétré de langues d'horizon Ahgj.

Dans la figure 3, qui est un exemple de terrain bosselé par le renversement des arbres par le vent, le pédon est la moitié du cycle. Dans de tels cas, les bosses ne sont généralement pas distribuées régulièrement et les dimensions du pédon peuvent varier considérablement sur de courtes distances.

La description de cette image précède.

Figure 3 : Pédon d'un podzol humo-ferrique orthique, phase turbique, sur un terrain bosselé formé par le renversement des arbres par le vent.

Coupe témoin

La coupe témoin est la section verticale du sol servant de base à la classification. Il est nécessaire de fournir un cadre uniforme pour la classification des sols. En général, les pédons doivent être échantillonnés au moins jusqu'à la profondeur de la coupe témoin. Les propriétés du matériau sous la coupe témoin sont importantes pour plusieurs besoins d'interprétation. C'est pourquoi le matériau sous-jacent doit être examiné et ses propriétés notées lorsque cela est possible.



Sols minéraux

En général pour les sols minéraux, la coupe témoin s'étend de la surface du sol minéral jusqu'à 25 cm au-dessous de la limite supérieure du C ou du IIC, du pergélisol, ou jusqu'à une profondeur maximale de deux mètres, suivant laquelle est la moindre. Les exceptions sont les suivantes :

  1. Si la limite supérieure du C ou du IIC est à moins de 75 cm de la surface du sol minéral, la coupe témoin s'étend jusqu'à une profondeur d'un mètre.
  2. Si le roc se trouve à une profondeur de 10 cm et plus, mais à moins d'un mètre, la coupe témoin s'étend de la surface jusqu'au contact lithique.
  3. Si le pergélisol se trouve à une profondeur de moins de moins d'un mètre, et que le sol ne présente pas d'indications de cryoturbation (cryosol statique), la coupe témoin s'étend de la surface du sol minéral jusqu'à une profondeur d'un mètre.

Sols organiques

A. Ordre organique

Pour les fibrisols, les mésisols et les humisols, la coupe témoin s'étend de la surface jusqu'à une profondeur de 1,6 m ou jusqu'à un contact lithique. Elle est divisée en trois étages utilisés pour la classification. Les étages sont des couches basées sur des critères de profondeur arbitraires.

Étage supérieur. L'étage supérieur est de 40 cm d'épaisseur. Il exclut la litière meuble, les collets de carex et de roseaux et les mousses vivantes. Le sol minéral à la surface du profil fait partie de l'étage supérieur. Cet étage est utilisé pour nommer la famille de sols. Les sols organiques minces sur un contact lithique ne peuvent posséder que l'étage supérieur.

Étage intermédiaire. L'étage intermédiaire est de 80 cm d'épaisseur. Cet étage détermine la classification du grand groupe de sols, si aucun contact terrique, lithique ou hydrique n'est présent. Au cas contraire, la sorte de matériau organique qui prédomine dans cet étage et dans l'étage supérieur détermine la classification du grand groupe. La nature du matériau organique sous-dominant dans l'étage intermédiaire ou inférieur aide à établir la classification du sous-groupe de sols.

Étage inférieur. L'étage inférieur est de 40 cm d'épaisseur. Le matériau dans cet étage détermine en tout ou en partie la classification du sous-groupe de sols. Pour les folisols, la coupe témoin est la même que pour les sols minéraux. Ces sols doivent avoir plus de 40 cm de matériaux foliques, s'ils reposent sur un matériau minéral ou organique ou plus de 10 cm, s'ils reposent un contact lithique ou un matériau fragmentaire.

B. Grand groupe des cryosols organiques

Pour les cryosols organiques, la coupe témoin s'étend de la surface jusqu'à une profondeur d'un mètre, ou jusqu'à un contact lithique. Il n'y a pas d'étages définis.

Source : Le système Canadien de classification des Sols (3ième éditions)

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